pourquoi être Educateur spécialisé ?

[amande]

bonjour à tous! vos différents messages m'interpellent...je suis ES depuis deux ans et travaille dans le social depuis 6 ans. Qu'entendez-vous par "vocation"? J'ai l'impression, mais je me trompe peut-être, que vous avez pour la plupart une vision idyllique du travail d'éduc! On est quotidiennement confrontés à la violence, à la désillusion, aux prises de tête et de bec avec l'équipe...etc...Etre éduc ce n'est pas seulement "aider les autres"; d'ailleurs je pense que l'éduc ne doit pas être dans une notion d'aide mais d'accompagnement, ce qui est complètement différent!!! Nous ne sommes plus dans une logique de charité chrétienne...et heureusement d'ailleurs! Avez vous au moins une première expérience dans le social pour affirmer vouloir devenir éduc? et je voulais demander à Céline ce qu'elle entend par "tu aides les gens pour t'aider toi-même" parce que sérieusement je trouve ca grave!!!!

[adeline]

Amande,
je crois que tu n'as pas saisi le sens de "vocation" employé à plusieurs reprises ici. Je pense que dire "etre educ spé est une vocation" n'a rien à voir avec le fait d'avoir une vision idyllique ou non du métier . quand on parle de vocation, on veut simplement dire que devenir éduc spé est quelque chose d'encré en nous, difficilement explicable parfois et que ce n'est pas un choix d'orientation du au simple hasard. genre un matin on se dit "et si je tentais les concours d'es" !! Non c'est quelque chose que l'on a en nous et qui nous pousse à vouloir faire ça, malgré toutes les difficultés de ce métier je te l'accorde (bien sur qu'il y en a et nous en avons tous conscience heureusement !!)
Parler de vocation en gros signifie que l'on est destiné à faire cela tout simplement...

A mon tour de te poser une question : pourquoi tant d'agressivité?

[roloto]

Amande
Cela fait lontemps que j'ai de l'expérience dans le social au sens large (ça va pour ma légitimité ?), même si je partage en partie ce que tu dis, il semble que cette question ne soit pas que dans un champ binaire, genre j'ai raison ils ont tord. Je pense qu'il y a plusieurs façon de pratiquer, de vision, de posture. la tienne te conviens tant mieux, celle des autres ne te convient pas tampis, mais remettre en question l'expérience des autres c'est short, l'humilité c'est bien aussi. Cependant il est vrai on peut se poser la question des pros qui viennent se soulager (se faire aiimer ou se soigner))dans leur taf, j'ai pu observer les dégats que cela faisait, et c'est pas beau.
Pour répondre à Maeva être éduc est d'abord un choix que pour ma part j'ai fais tard. J'ai préféré vivre, avoir un vécu qui me permette de rlativiser moi et l'autre ou le je et le tu. Pourquoi m'inscrire dans une relation d'aide ou d'accompagnement(je fais plaisir à Amande), cela ma chère c'est surement du à mon histoire, comme d'ailleurs chacun d'entre nous. Le plus difficle dans l'histoire c'est de gérer ce que me renvoit l'autre et la cruauté humaine (et la je parle d'usagers comme de certains pros). pERSONNE NE T'a fait la réflexion concernant ton âge. Je me permet de te la faire, car par la suite être éduc aujourd'hui c'est s'occuper de gens fragiles, usés, en souffrance, et c'est prendre plein la gueule la misère de notre monde. Nous nous occupons des pathos que produit notre société. Alors si c'était moi qui à ton âge aujourd'hui, j'attendrais un peu avant de vouloir m'occuper de ces maux là, car cela te fais grandir prématurément alors que l'insouciance doit se vivre et se consummer.Tu es la seule à décider pour toi, prend en compte tout de même cela.

[Eglantine]

Personnelement, je voudrais être éduc spé parce que je pense que si j'arrive à sortir au moins une personne de ses problèmes, à lui faire en quelque sorte retrouver le droit chemin comme on dit, alors m'a vie aura servie à quelque chose...
Et puis aussi parce que j'ai rencontré des jeunes que l'on a pas su aiderquand ils en ont eu besoin et je me dis que je pourrais peut être changer la donne pour d'autres. Je sais bien que celà peut paraitre idéaliste ou utopique et que je ne changerais pas le monde à moi toute seule mais je préfère essayer plutôt que regarder sans rien faire.

[fred]

Salut Maeva,
si pour t'aider je peux t'être d'une aide quelconque alors voici un extrait de mon mémoire (préambule) de fin d'année pour l'obtention du diplôme éduc (si tu veux je peux te le fournir en intégralité). Bonne chance pour ton devoir

Extrait :Lorsque je lis la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 où est stipulé l’article :
« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. ».
Je vois en ces propos toute l’espérance d’une nation qui sur fond de « liberté, égalité et fraternité » croit en une société tolérante, humaniste et solidaire. Je crois en ces valeurs républicaines qui font de moi un citoyen à part entière en droit et en devoir.

En choisissant ce métier d’éducateur spécialisé, je m’inscris plus spécifiquement encore dans une action citoyenne. Je ne parlerai pas de vocation mais plutôt de conviction à laquelle je veux associer cette lutte contre les inégalités des chances.

[amande]

désolée si j'ai pu paraÎtre agressive, c'était pas mon intention

[roloto]

Fred sans vouloir te froisser je trouve rétrograde les références que tu cites. On est a une époque différente, avec des évolutions et des valeurs différentes. les droits de l'homme, tous les jours en sortant de chez moi je les trouvent bafoués, un sdf là, au autre là las. l'égalité, quelle ironie de penser à cela aujourd'hui. J'ai été au burkina fasso dans une mission avec des jeunes sortant de prison. certains collègues éducs en se balladant dans la rue s'exlamaient en disant que c'était un pays merveilleurs avec des vrais valeurs que nous avons soi disant perdues dans notre société. En rajoutant qu'il manquait à ce peuple l'application des droits de l'homme. le seul bémol, dans cette histoire, c'est que quand tu baissais les yeux tu voyais des jeunes ou des gens crever de faim ou du palu. Comment peut t-on dire que ce pays est merveileux avec des vrais valeurs. Pour eux les droits de l'homme est un concept philosophique et non de terrain. Je ne suis pas hors propos, c'est juste pour te dire que les concepts aujourd'hui que tu cites en tout cas pour moi, ne sont plus d'actualité. Le rêve iddylique de ce genre ne propos ne ramène pas à la réalité que nous vivons; En ce sens je rejoins Amende, qui dépeint une réalité moins virtuelle.
pour Eglantine sache que j'ai choisi ce métier il y a 16 ans pôur les mêmes raisons. Fais en sorte que cela ne devienne pas un malaise plus tard professionnel.
En tout cas bonne chance

[sarah]

bonjour maéva, moi je n'ai que 20ans et je veux devenir éduc spé!je le sais depuis que je suis petite, je pense que chacun a sa raison personnelle, moi elle date des jeux aux récréations en primaire avec des handicapés mentaux! ca reste en moi, j'ai un besoin, je suis attirée par eux, j'ai besoin d'etre avc eux, j'ai envie de leur apporter plein de choses, de leur apprendre plein de chose. de plus c'est un métier qui nous permet de toucher a bcp de domaine... après tout dépend de l'envie, l'attirance qu'on a. Moi je suis plus "attiré" par les handicapés mentaux. Je travaille cependant avec des autistes. bref c'est un métier passionnant masi je pense, enfin je suis sure, que c'est un métier très difficile!! il faut etre bien dans sa peau, il faut aussi penser aux contraintes que ce métier engage au sein de notre vie de famille...
Pour ma part j'espère vraiment y arriver...
bon courage

[marie]

Bonjour et un petit clin d'oeil à Roloto qui décidement me donne envie d'aller dans le sud mais juste par curiosité hein pas pour y rester juste pour échanger!
voici un petit texte qui m'aide dans mes moments de doutes (ben voui des fois on doute...) bonne lecture et si vous êtes sage je vous dirais qui en est l'auteur... à moins que cela ne soit plus vraiment un secret!


Devenir éduc

Ils arrivent avec des idées plein la tête et avec la certitude de pouvoir éradiquer la misère humaine et de transformer le monde. Ils affirment haut et fort vouloir s’engager dans la relation humaine, comprendre l’Autre et lui donner tout cet amour qu’il n’a pas reçu à cause de se différences. Ils sont convaincus que la relation d’aide est une question de transfert de ceux qui ont, c’est-à-dire « eux », vers ceux qui n’ont pas, à savoir « les autres ». Ils imaginent qu’il suffit de savoir écouter et d’être patient pour que la bonne volonté arrive à bout de tout. Ils pensent qu’il n’y a aucune raison pour que l’autre ne veuille pas le bonheur qu’il souhaite lui apporter. Et, au bout du compte, s’ils sont prêt à s’accrocher à toutes ses illusions c’est tout simplement parce qu’ils souhaitent être éduc. Un point c’est tout ! Et cette naïveté, qui parfois nous surprend, n’est en vérité que le propre reflet de notre image à un autre âge : nous aussi, nous avons cru tout cela à nos débuts, bien avant que la temps vienne polir nos passions et que la formation puis l’expérience changent nos tripes en outil.

Or, c’est bien parce que l’on ne sauve pas l’autre contre son grés et que l’on ne fait pas de lui se que l’on voudrait qu’il soit, à la façon de Rousseau dans l’Emile, et c’est bien parce que l’éducateur n’est ni Jésus ni Marx que la formation à ce métier exige autre chose que l’assimilation de savoirs théoriques et l’acquisition de quelques savoir-faire. De fait, il n’y a pas trop de deux ou trois années d’études et d’alternance entre centre de formation et stages de terrain pour laisser s’immiscer des doutes, pour casser des représentations, pour s abandonner à la déconstruction de ce qui faisait tous les repères identitaires et pour s’engager dans un douloureux travail de reconstruction de soi. Alors celui qui il y a encore peu, s’appuyait sur une vision simple du monde pour le transformer découvre avec stupéfaction que l’individu maltraité participe à sa propre maltraitance, qu’il préfère être humilié plutôt que d’être ignoré, qu’il n’est pas du tout enclin à faire confiance à qui que se soit, qu’il attend autre chose que des discours de surface, des rappels rapides à la loi ou des effets de séduction, et qu’il est près à n’importe quel passage à l’acte pour s’assurer de la solidité d’un éventuel lien éducatif.

Parce que la souffrance est comme une étoile noire, capable d’éteindre les réverbères du Petit Prince, alors celui qui, avant d’entrer en formation, pensait être solide et sûr de lui-même, découvre soudainement sa part obscure, ses violences refoulées, ses limites et son besoin d’aide. Il n’y a pas d’un côté le souffrant et de l’autre le bien portant, d’un côté le normal et de l’autre le pathologique, mais une sorte d’aspiration à confondre ce qui, de part de d’autre, se ressemble en dépit des différences. L’autre c’est déjà moi. Aussi le devenir éduc emprunte-t-il le chemin aride qui mène d’abord de soi à soi…

Lucien Bargane

Lien social numéro 671, 26 juin 2003, page 13. Lien Social

[roloto]

Marie tu es la bienvenue.